POUR INFORMATION
Lucien MOULLIER Le 12 mars 2018
4 impasse des Genêts
Montée du Guet
42130 Boën sur Lignon
lucien.moullier@wanadoo.fr
Evence RICHARD
Préfet de la Loire
s/c
Rémi RECIO
Sous-Préfet de Montbrison
Square Honoré d’Urfé CS 80 199
42605 MONTBRISON Cedex
Objet : Enquête publique ( 26 janvier / 26 février )
Demande de Monsieur le Président Directeur Général de la société STAL TP en vue d’obtenir l’autorisation d’exploiter une centrale d’enrobage à chaud et un centre de concassage de matériaux inertes à
« Champbayard » 42130 Boën sur Lignon
P.J. : analyse technique du dossier transmise par Julien Plantier
Monsieur le Préfet,
Je souhaite tout d’abord vous informer que le Commissaire-enquêteur, Michel ZOBOLI, a conduit cette enquête publique, difficile et délicate, tant le dossier est complexe sur le plan technique et tant l’émotion suscitée dans la population est grande, avec rigueur.
Notre pays, la France, peut s’honorer, à juste titre de cette procédure qui relève de la démocratie participative au cours de laquelle toutes les citoyennes et tous les citoyens peuvent faire part de leur opinion sur le dossier soumis à enquête publique.
Les permanences ont été assurées avec une ponctualité remarquable et l’enquête s’est déroulée de façon parfaite. Le Commissaire-enquêteur a fait preuve d’une grande capacité d’écoute, tout en gardant une neutralité totale. Le public a été accueilli dans des conditions parfaites au second étage de la mairie dans une grande salle, disposant d’une table suffisamment
grande pour que le dossier puisse être consulté en toute quiétude et les observations déposées sur le registre en toute liberté. Sans cette procédure d’enquête publique ni les élus, ni la population n’auraient été correctement informés : le nouveau Maire de Boën sur Lignon communiquant abondamment sur une promesse mirobolante d’une « soi-disant » création de 50 emplois pour endormir la population alors que le chef d’entreprise lui-même annonce la création de 10 emplois dans son dossier officiel déposé à la Préfecture pour l’enquête publique mais, combien d’emplois perdus, suite à des arrêts d’activités qui ne pourront pas rester dans cette zone artisanale, commerciale et de services à la population !
Mais, j’ai hélas plusieurs observations graves à formuler :
1) Hors des quatre permanences du Commissaire-Enquêteur, le dossier était consultable dans une petite pièce qui sert de bureau, à la fois à l’employée chargée de l’urbanisme et à l’adjoint délégué à l’urbanisme. Le dossier était placé sur le bureau de l’adjoint, encombré de dossiers et de documents divers et la consultation se faisait en présence de l’employée, certes d’une parfaite discrétion, mais de telles conditions de consultations ne respectent pas, me semble-t-il, la confidentialité et la quiétude qui doivent prévaloir pour l’accueil des citoyennes et des citoyens désireux de s’informer et désireux de faire une déposition sur le registre. Il y a pire, hélas ; de nombreuses personnes m’ont fait part des pressions exercées par Monsieur l’Adjoint à l’Urbanisme, voire de son hostilité manifeste à leur égard !
2) Le mercredi après-midi, 21 février, le dossier était consultable dans la grande salle du rez-de-chaussée où les allées et venues sont incessantes, où se situe la banque d’accueil du public et où se trouve quatre postes de travail sans compter les deux postes de travail à la banque d’accueil vitrée !
3) Monsieur le Maire n’a pas jugé utile d’ouvrir la mairie, au moins un samedi matin, ce qui eût permis aux personnes qui ont une activité professionnelle qui les empêchait de se rendre en mairie en semaine, de consulter le dossier et de faire une déposition sur le registre. Il est à noter que pour la plupart des enquêtes publiques, une permanence est prévue un samedi matin…
4) Je déplore et je dénonce le non-respect de l’affichage réglementaire préalable au lancement de l’enquête dans deux communes : Saint-Sixte (aucun affichage ni à l’extérieur de la mairie ni dans la mairie au démarrage de l’enquête) et Boën sur Lignon (affichage non règlementaire). Je rappelle solennellement que « l’avis d’enquête publique doit être affiché quinze jours avant le début de l’enquête et pendant toute la durée de celle-ci, en Mairie siège de l’enquête (Boën sur Lignon), dans les mairies concernées par le rayon d’affichage (Arthun, Sainte-Agathe-la-Bouteresse, Trelins, Leigneux et Saint-Sixte) ». Un constat d’huissier a été effectué les 24 et 25 janvier que nous tenons à votre disposition à toutes fins utiles ;
5) Je constate l’absence d’attestation du Président de Loire Forez Agglo, seule collectivité locale compétente en matière d’économie et propriétaire du terrain, sur la remise en état du site STAL TP après cessation éventuelle d’activité. En lieu et place, figure dans le dossier, une attestation du Maire de Boën sur la remise en état du site STAL TP après cessation d’activité, qui n’est pas établie sur papier à en-tête de la Mairie et ne comporte pas de tampon officiel sur la signature ;
6) Je dénonce un manquement grave à la législation en vigueur qui exige l’étude de trois sites pour toute installation classée au titre de l’ICPE. Le porteur du projet, Mr Anthony STAL n’a envisagé et étudié qu’un seul lieu d’implantation : le parc de Champbayard !
7) Je remarque l’absence de consultation de l’Institut National des Appellations d’Origine (INAO), en infraction avec l’article L-512 du Code de l’environnement;
8) L’avis de l’Agence Régionale de Santé (ARS), du 11/01/2018, très défavorable et très bien argumenté, ne figure pas dans le dossier de l’enquête publique. Il est pourtant essentiel compte tenu de la présence du Centre hospitalier : 140 lits EHPAD / 15 lits de SSR / service d’accueil de jour / 60 places en Service de soins infirmiers à domicile/ jardin thérapeutique et espace de déambulation extérieurs pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer… à moins de 200 m ;
9) L’absence de l’avis du rectorat de l’Académie de Lyon alors que le bruit engendré par l’activité de concassage va fortement perturber les cours au Collège et au Lycée situés à moins de 300 m et aggraver considérablement les risques d’accident grave, dans un secteur déjà très accidentogène, du fait d’un flux incessant de poids lourds de fort tonnage ( 70 par jour, soit 140 allers-retours, la future installation se trouvant dans un cul de sac car le Parc d’activités de Champbayard n’a pas de sortie sur la RD 3008 ! ). Beaucoup de parents envisagent de retirer leurs enfants et / ou de ne pas les scolariser au collège et au lycée si STAL TP s’installe dans le Parc d’activités de Champbayard ;
10) L’absence d’analyse hydrogéologique : aucun rapport n’a été demandé à un hydrogéologue malgré le risque de pollution de la chaîne des étangs du Forez (le premier étang est à moins de 250 m) en cas de dysfonctionnement de l’installation ou d’incendie. Cette chaîne des étangs dont la diversité biologique est exceptionnelle est classée en site NATURA 2000 au niveau européen. De plus, les risques engendrés par la nature du sous-sol, bien connue des riverains et des élus et le risque de pollution des sols et de l’eau du Lignon, de l’Onzon et de toute la chaîne des étangs du Forez, par infiltration ou rejet de l’eau polluée dans le bassin de rétention sont bien réels ;
11) Des manquements et des insuffisances du dossier, pointés dans le délibéré de la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAE) en date du 17/01/2018 , des erreurs intentionnelles ou pire de la légèreté du dossier sont à souligner :
- cartes IGN obsolètes ( 4e édition de 1995, semble-t-il) ;
- étude des odeurs non effectuée ;
- méfaits sur la santé en raison du rejet dans l’atmosphère de produits toxiques comme les Composés organiques volatiles (COV) tels les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dérivés du benzène, le redoutable benzopyrène ( risque mortel par les fumées dès qu’on le chauffe) ou encore l’acétaldéhyde, l’acroléine, le formaldéhyde, tous classés au titre de la réglementation CMR (cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques) par la Sécurité Sociale.
cf. CIRC / Centre International de Recherche contre le cancer / l’Agence de l’OMS / Organisation Mondiale de la Santé / ou les études du Professeur Jean-François NARBONNE de l’Université de Bordeaux 1 sur le sujet.
- Plus graves encore, les fumées toxiques générées par le four de fabrication du bitume ( enrobé à chaud ), les additifs, les liants, les « fillers » et autres vapeurs de bitume chaud, émettent des micro et des nano particules dont les conséquences sur la santé sont similaires à ceux de l’amiante ;
- Les études d’impact exigées dans le cadre des ICPE soumises à autorisation sont insuffisantes ou inexistantes (Plan de Prévention des Risques Technologiques, risques d’incendie / PPRT / PPRI) ;
- Que penser des risques graves d’explosion et d’incendie des grosses cuves à bitume ou/ et de celles de gaz ? Nos pompiers sont-ils formés et disposent-ils de l’équipement pour faire face à une telle éventualité ?
12) La MRAE (Mission Régionale d’Autorité Environnementale) pointe aussi que « le projet n’est pas compatible avec le Plan d’Occupation des Sols (POS) actuellement en cours » et qui a seul, force de loi. Le Plan Local d’Urbanisme (PLU), élaboré par la nouvelle majorité municipale, dont la réglementation a, comme par hasard, été considérablement assouplie pour permettre ce genre d’installation, n’a pas encore été approuvé par le Conseil communautaire de Loire Forez Agglo (qui est seule autorité locale compétente en matière d’urbanisme, depuis le 01/01/2017). A fortiori, Il n’a donc pas fait l’objet d’un arrêté préfectoral et n’est pas opposable aux tiers. Ce nouveau PLU fera, sans aucun doute, l’objet d’un recours gracieux et d’un recours contentieux auprès du Tribunal Administratif pour annulation ;
13) La destruction des conditions de vie locales sera dramatique : odeurs de bitume très fortes et nauséabondes, augmentation du trafic routier avec près de 70 poids lourds de plus par jour, soit 140 passages aller-retour, bruit infernal du concassage, dépôt de poussières dans les logements et les jardins, nombreux dans notre petite ville à caractère rural ;
14) L’impact négatif sur l’agriculture, les productions agro-alimentaires et le tourisme sera catastrophique à cause des émissions de poussières toxiques. Les nombreuses exploitations agricoles présentes dans notre Pays d’Astrée (élevage bovin, porcin, ovin, caprin, élevage de poules en plein air avec production d’oeufs, troupeaux de vaches laitières et production d’un lait de haute qualité, vergers et vignobles des « Côtes du Forez », labels AOC / AOP et /ou IGP, label (ou passage) en agriculture biologique (AB) irrémédiablement perdus à terme pour un grand nombre d’exploitations menacées de disparition pour des raisons économiques et écologiques. Les conséquences négatives sur la fréquentation touristique seront elles aussi immédiates pour de nombreux gîtes ruraux et chambres d’hôtes, l’accueil à la ferme, les campings, les auberges et restaurants / les sites touristiques importants tels le Château de la Bastie d’Urfé ( demeure d’Honoré d’Urfé, auteur du premier grand roman d’Amour de la langue française, L’Astrée ), le « Jardin d’Astrée » géré par le CILDEA ( Centre d’Initiatives Locales pour l’Activité et l’Emploi, agréé par la Direction départementale de la Cohésion sociale, Pôle Emploi et le Conseil départemental) où près de vingt personnes en insertion professionnelle et sociale font du maraîchage bio et de la permaculture), le Château de Goutelas ( labellisé par le Ministère de la Culture « Centre Culturel de Rencontre » / Humanisme, Droit et Création ), le château Ste Anne et sa volerie d’aigles à Marcilly le Châtel, le Prieuré de Montverdun ( site Casadéen, seul à avoir été présélectionné dans notre département par la « Mission Stéphane Bern »), la réserve naturelle de Biterne, le Château de Boën sur Lignon classé Monument Historique ( XVIIIe siècle) et son musée des vignerons foréziens / le Château de Sail sous Couzan (site Clunisien), le Chemin de St Jacques de Compostelle qui traverse notre territoire / le Chemin de Montaigne, récemment aménagé et classé GR par la Fédération Française de randonnée pédestre/ les Chemins de L’Astrée… ;
15) L’immobilier à Boën sur Lignon, Sainte Agathe la Bouteresse et dans toutes les communes de notre Pays d’Astrée sera fortement déprécié, voire invendable dans un périmètre rapproché ;
16) C’est le site le plus mal choisi qui puisse être proposé pour une telle activité en raison de la présence immédiate d’établissements publics de santé ( centre hospitalier / SSIAD / service d’accueil de jour ), privé ( cabinet de kinésithérapie et centre de relaxation et de bien-être), d’installations sportives en salle (deux salles de sports) et en extérieur ( plateau d’éducation physique, piste d’athlétisme, aires de saut et de lancer de poids et de javelot), d’une chambre funéraire, du centre de tri postal, d’une aumônerie, de plusieurs entreprises artisanales et de la proximité de nombreuses habitations tant sur la commune de Boën sur Lignon que sur la commune de Ste Agathe la Bouteresse qui est limitrophe et exposée aux vents d’ouest dominants.
Au vu de tous ces éléments, au vu de tous les risques déjà connus et évalués, il serait intolérable et surtout irresponsable d’autoriser une telle installation, au vu de toutes les insuffisances et manquements constatés dans le dossier de présentation fourni par STAL TP (cf. en annexe l’analyse transmise par Mr Julien PLANTIER).
J’estime que des projets de ce type devraient être implantés dans des zones spécialisées, éloignées des agglomérations et des habitations et que les normes actuelles de rejet dans l’air d’émissions des poussières et fumées toxiques, auraient grand besoin d’être renforcées ainsi que les contrôles effectués par les services de l’Etat pour préserver la santé des populations et limiter les gaz à effet de serre qui contribuent grandement au dérèglement climatique.
Les documents que nous avons consultés et les enquêtes que nous avons menées sur ce type d’installation sont loin de l’image aseptisée et rassurante que nous délivrent l’entreprise STAL TP et le Maire de Boën sur Lignon qui minimisent les risques et camouflent les dangers. La signature de l’autorisation d’exploiter constituerait une décision grave et engagerait lourdement la responsabilité de l’Etat en faisant fi de l’absolu principe de précaution (inscrit dans notre constitution depuis le quinquennat de Jacques CHIRAC en 2005), qui doit prévaloir pour une installation classée au titre de l’ICPE.
Je vous prie de croire, Monsieur le Préfet, en l’assurance de mes respectueuses salutations.
Lucien MOULLIER
Pupille de la Nation
Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques
Officier dans l’Ordre National du Mérite
Professeur certifié honoraire de Lettres-Anglais
Conseiller municipal
Maire honoraire de Boën sur Lignon
Conseiller général honoraire de la Loire
Ancien conseiller régional Rhône-Alpes
20 MARS 2018